Mardi 25 juillet, erreur de navigation
Le départ de la piste qui mène aux villes fantômes d’Aurora et Bodie est parfaitement indiqué à la sortie de Hawthorne. Ensuite, ça se complique. Nous nous égarons en ratant une intersection et parcourons une trentaine de miles dans une mauvaise direction. C’est sur cette route que nous découvrons un ranch étonnant. Alors que les alentours sont particulièrement désertiques, le ranch est entouré de prairies très vertes où paissent vaches et chevaux. La maison elle-même est séduisante bien que sans grand caractère. Son architecture rappelle un peu les demeures du sud avec ces galeries qui ceinturent le bâtiment au rez-de-chaussée et à l’étage. Elle n’a évidemment pas le caractère des maisons de la Louisiane mais se distingue de l’architecture locale, assimilable globalement à celle de la cabane.
Le Ranch.
En poursuivant notre route (la mauvaise), nous découvrons un coin de paradis : le méandre d’une rivière, une prairie et deux grands arbres posés là au milieu du désert. C’est le rendez-vous des pêcheurs du coin comme en témoignent quelques panneaux et les nombreuses traces de feux de camp que nous trouvons sur les rives. Encore quelques kilomètres et nous arrivons sur une route goudronnée, ce qui n’était absolument pas prévu. Nous avons roulé vers l’ouest au lieu du sud et sommes bon pour rebrousser chemin sur une quarantaine de kilomètres jusqu’à l’intersection que nous avons ratée.
« Goodbye God, I’m going to Bodie »
Nous ne trouverons jamais Aurora, ce qui en fait la ville la plus fantôme de notre voyage. Peut-être sommes-nous passés devant sans nous en rendre compte ou avons-nous raté un embranchement…
Nous arrivons à Bodie pour le pique-nique que nous prenons en compagnie de mouettes de Californie et d’un groupe de San Franciscains joviaux qui nous apprend là le crash du Concorde.
La visite de la ville fantôme est très intéressante, bien qu’en fait de fantôme, elle pullule de touristes en shorts. Bodie doit son nom à Waterman S. Body, un prospecteur qui découvrit de l’or à cet endroit en 1859, avant de mourir l’année suivante dans une tempête de neige. Il faut dire que le site est à plus de 2500 mètres d’altitude. Les montagnes alentour sont de véritables gruyères percés de galeries. La ville comptait 10 000 habitants vers 1880 et avait la réputation d’un lieu de perdition où « the Bad Man of Bodie », personnage mythique du far west, réglait ses différends à coups de couteaux et de pistolets. La ville était citée comme « the most lawless, wildest and toughest mining camp the far west has ever known ».
Beaucoup de touristes !
Le déclin de Bodie s’amorça avec le siècle. En 1932, elle fut ravagée par un incendie accidentel dont elle ne se releva pas. 90% de la ville furent détruits et jamais reconstruits. Les derniers habitants disparurent dans les années 50, et Bodie devint un parc d’état en 1962. Elle continue à faire l’objet de nombreuses restaurations. Les maisons ont encore, pour beaucoup, leur mobilier de la fin du siècle. La plupart sont fermées mais on peut observer les intérieurs par les fenêtres, ce qui explique les concentrations de touristes collés aux vitres.
Mono Lake
Après Bodie, nous attaquons la dernière partie de l’étape. Une piste descend jusqu’à Mono Lake et Lee Vining où nous avons réservé au Murphey’s Motel. Nous y posons nos affaires et repartons vers le sud du lac et ses décors de concrétions, les « Tufa ».
Mono Lake est un lac très intéressant. Il a la réputation d’être le plus ancien d’Amérique du nord. Il ne dispose d’aucune évacuation et ne se vide que par évaporation. La concentration de minéraux explique sa salinité, environ cinq fois supérieure à celle de l’océan. Il est essentiellement alimenté par les torrents de la Sierra Nevada et des montagnes environnantes. Malheureusement, une grande partie de ses ressources naturelles d’eau a été détournée au profit de Los Angeles et le lac est menacé d’assèchement. Son niveau a baissé de plusieurs mètres dans les cinquante dernières années, ce qui laisse apparaître d’étranges concrétions, les « Tufa » (tuffs?), qui, à l’origine se créent sous la surface de l’eau par un phénomène chimique entre les minéraux et les eaux d’infiltration.
Mono signifie « mouches » en indien Païute. Nous comprenons vite pourquoi. Les rives du lac sont recouvertes de milliards de petites mouches noires. Au point qu’on ne s’en aperçoit qu’en marchant dessus : on est alors tout surpris de voir ce que l’on prenait pour un dépôt se transformer en nuée à l’instant où le pied se pose. Mono Lake, et surtout l’île de Pahoa, est aussi une réserve d’oiseaux marins. Des milliers de mouettes et de nombreuses autres espèces viennent y nicher, ce qui interdit de visite certaines parties du lac en période de nidification.
Mono Lake
Panum Crater
Un peu plus tard, nous escaladons le cratère de Panum, juste au bord du lac. Nous y découvrons de belles pierres vitrifiées et Thomas s’amuse à soulever d’impressionnants blocs de pierre ponce. De retour à Lee Vining, petite ville touristique sans grand intérêt, nous nous régalons de Sirloin et de New York Steak dans un bon restaurant du coin.
Au coeur du cratère